« Je fais du son pour une image mais il faut que l’image laisse du temps au son ». C’est ainsi que Claudine Nougaret présente son travail d’ingénieure du son, dont elle fut l’une des pionnières en France. La BnF lui consacre une exposition intitulée Dégager l’écoute depuis le 14 janvier.
Le nom de Claudine Nougaret est depuis plus de trente ans indissociable de celui de Raymond Depardon dont elle est devenue la partenaire, elle au son, lui à l’image. « J’ai la chance que Raymond soit un homme d’image qui écoute », se réjouit-elle. Leur collaboration remonte à 1987, à l’occasion du film Urgences consacré à l’accueil des « personnes en souffrance psychiatriques » à hôpital de l’Hôtel-Dieu à Paris. Depuis, tous les films de Raymond Depardon sont le fruit de leur duo artistique, consolidé par la fonction de productrice occupée par Claudine Nougaret pour chaque tournage.
Venue au son après des études de musicologie, Claudine Nougaret a compris que « les sons de la vie peuvent devenir une musique ». Cette révélation a guidé son envie de « restituer les sons de la vie » et de se spécialiser dans le son direct au cinéma. Sa première vraie expérience professionnelle s’est réalisée à l’âge de 24 ans sur le film d’Eric Rohmer Le rayon vert, alors que la profession était encore majoritairement masculine.
Chaque film documentaire de Raymond Depardon et Claudine Nougaret est une plongée, que ce soit dans les profondeurs du monde rural (Profils paysans, La vie moderne), à la rencontre du quotidien des Français (Les Habitants), aux coeurs d’institutions rarement montrées de l’intérieur tels tribunaux, hôpitaux, établissements psychiatriques ou commissariats (on pense à Délits flagrants, 10ème chambre, instants d’audience ou 12 jours) mais aussi sur le continent africain (Afriques, comment çà va avec la douleur, Empty qarter, La Captive du désert) ou à travers le monde (Donner la parole). Ils se sont, entre autre, attachés à composer un portrait visuel de la France à travers « le récit des personnages filmés comme un texte sacré ».
Au delà de l’image, le son, les langues, la parole, la voix sont les matières constitutives de leurs films qui ont déterminé l’exposition de la BnF, née de la rencontre de Claudine Nougaret avec Gabriel Bergounioux, sociolinguiste, directeur du Laboratoire Ligérien de Linguistique (LLL). La bande son du film Les Habitants est devenue pour ce chercheur une formidable source pour étudier le français parlé.
Comment faire une exposition sur le son ? Sans doute rien de plus difficile au risque d’être trop technique (ce volet d’analyse scientifique de la parole est toutefois présenté). L’exposition propose d’une part un film spécialement réalisé pour l’occasion par Raymond Depardon et Claudine Nougaret qui nous permet de comprendre leur travail de l’intérieur, l’extraordinaire intrication de l’image et du son dans leur oeuvre et nous découvrons d’autre part du matériel de tournage, de nombreuses photos et des affiches qui retracent leur parcours commun.
Nous revisitons ainsi l’histoire de leur aventure magnifique, l’histoire d’un couple de travail et d’un couple dans la vie, d’une histoire d’amour, d’un engagement absolu. Le grand mérite de Dégager l’écoute est justement de dégager le nom de Claudine Nougaret, jusque là recouvert pour le public par celui du grand photographe et réalisateur qu’est Raymond Depardon.
Le couple a fait don à la BnF de leurs archives filmiques et sonores, laissant ainsi « une trace de la façon de parler de 1975 à nos jours (…). Toute une mémoire française » précise Claudine Nougaret.
Claudine Nougaret, dégager l’écoute. Le son dans le cinéma de Raymond Depardon. Jusqu’au 15 mars 2020, BnF François Mitterrand/Galerie des donateurs. www.bnf.fr
Coucou Corinne!
Merci! Bien envie d’aller voir cette expo de Claudine…
Bises de belle année et tous mes vœux pour tes amours, pour ton livre, et ton blog…
Mireille
Merci chère Mireille, je t’embrasse